Le Chili de long en large

Avec plusieurs étés à skier, surfer ou chiller au Chili, notre Photo Reporter Arthur Ghilini vous livre en quatre étapes les clefs de ce pays “qui a tout à offrir“. Non le Chili n’est pas le pays du piment ! Et ce ne sont certainement pas non plus ses spécialités culinaires qui en ont font une destination exotique. Fort de ses 4300 km de longueur, soit tout en montagnes soit tout au bord de l’Océan Pacifique, ce territoire est un paradis des sports outdoor, et aussi et principalement l’un des terrains miniers les plus vastes du monde.

Ce petit couloir de terre situé à l’Ouest du continent Sud-Américain, cerné par les Andes à l’Est et le Pacifique à l’Ouest, est à peine plus grand en superficie que la France, mais pour une largeur moyenne de 180 km ! Le Nord est désertique. Le Sud luxuriant. Ses terres regorgent de minerais mais aussi et surtout de trésors tels le vent, les vagues, la montagne, la neige, les volcans, les lacs, les rivières.  Le pays qui a tout à offrir…

Santiago et la région centrale

Le ski commence ici. Santiago est un passage obligatoire. Un conseil : faites ce que vous avez à faire et sortez de là. La première fois se passe généralement sur le Camino Farellones. A une heure de la grande Babylone, au bout du chemin se trouvent les ‘3 Vallées’ du Chili que sont El Colorado, La Parva et Valle Nevado. Mais contrairement à l’Europe ici on ne travaille pas ensemble. Les trois stations constituent en effet un grand parc de téléskis et de télésièges situés sur une même montagne, mais étonnamment aucun forfait commun n’existe, chacun reste chez soi. El Colorado est la station la plus familiale, celle qui accueille les débutants, qui reste jeune et freestyle. La Parva rassemble quelques centaines d’appartements appartenant aux bonnes familles de Santiago. C’est là que les pistes sont les plus longues et où les équipes nationales de ski viennent passer une bonne partie de l’hiver. Valle Nevado de son côté est comme un grand hôtel avec son bar, sa boîte de nuit, tout ça réservé aux clients de la station. Malgré tout, elle reste sûrement la mieux lotie pour le freeski.

Les choses commencent vraiment au sommet des lifts. De là, vous accédez à la montagne (bravo vous venez de gagner 1000 m). Chaussez les peaux aux environs de 3600 m et gravissez là vos premiers 4000 chiliens en commençant par le Cerro La Parva. Si vous avez la forme, peut-être qu’après deux jours de rando vous atteindrez le sommet du El Plomo et ses 5424 m. Entre les deux, des dizaines de couloirs et autres possibilités s’offrent à tous. Au dessus de 5000 m, si vous avez le courage d’y aller, c’est le vent qui règne, et le plus souvent les cimes se retrouvent rapidement chauves. Même à des altitudes moindres, le vent est le premier facteur changeant. Associé à un soleil fort et omniprésent sur pratiquement toutes les orientations -dû à une situation plus proche de l’équateur que dans les Alpes-, on y retrouve plus de stabilité dans le manteau neigeux, mais ces conditions ne laissent que peu de temps pour profiter des chutes de neige. Le meilleur spot pour faire du dénivelé reste sans aucun doute la face de Santa Teresa, où se déroule le Freeride Chillan Championship. Seul souci : après avoir marqué de vos traces cette grande pente de 700 m sur plus de 3 km, vous arrivez sur la route sans aucune remontée.

Si vous êtes organisé(e) (voiture + forfait), comptez alors 1 heure pour 1 run. Après quelques jours, on comprend pourquoi tout le monde vous rappelle que «who rushes loses time», comprenez « qui se presse perd du temps ». Alors on ne se presse pas, c’est pas bon pour le moral. Le plus de Farellones, ce sont les couchers de soleil qui balayeront tous les autres de votre mémoire ; prenez le temps d’en profiter !

A deux heures vers le Nord, sur l’immense route frontalière qui mène à l’Argentine, on retrouve la célébrissime station de Portillo. Pour skier là, il n’y a pas beaucoup de solution. La plus facile -mais la plus onéreuse- consiste à réserver une chambre dans le seul hôtel du lieu, qui est aussi le seul bâtiment. Un autre petit hôtel jaune et son lac sont aussi accessibles au client lambda, mais la route qui permet de monter là-haut n’est ouverte que de 8 à 18 heures (selon enneigement) ! Rien n’a bougé ici depuis 60 ans. Le lieu n’en reste pas moins exceptionnel. Le plus, ici, c’est la route, qui aligne sommet après sommet à ses abords. Depuis Portillo jusqu’à sa station voisine de Los Penitentes en Argentine, il n’y a que l’embarras du choix pour laisser l’auto sur le côté et partir à l’assaut des sommets les plus massifs des Andes. En pénétrant par exemple dans la vallée qui vous mènera au pied de l’Aconcagua (6972m), le plus haut sommet de la cordillère.

Au Sud de Santiago, plusieurs vallées gigantesque quittent les plaines pour s’enfoncer sur des centaines de kilomètres dans la Cordillère, formant des méandres incompréhensibles sans une carte Topographique (inexistante) ou Google Earth, souvent le seul moyen de se rendre compte où l’on se trouve.

Les volcans chiliens

D’abord, sortir de Santiago. Puis prendre la « Ruta 5 ». C’est la dernière ligne droite avant

le bout du continent. Cette route fait partie de la Panaméricaine qui arrive tout droit d’Alaska et par la même occasion est le principal axe routier. Comptez 5 heures pour atteindre les premiers volcans. Plus vous descendez, plus le paysage s’ouvre et les cônes de neige géants font leur apparition : vous admirez alors la ceinture de feu du Pacifique. Dans les villages la vie est plus simple et plus calme qu’à la capitale. L’herbe est verte, les forêts sont denses, la nourriture est de meilleure qualité, la viande pousse en abondance et le folklore peut enfin reprendre le dessus. Sans oublier le bonheur qu’offrent les dizaines de piscines thermales présentes autour des volcans. Les jours de repos deviennent de vrais jours de repos, avec comme seuls perturbateurs les rares alertes d’éruption d’un côté et de tsunami de l’autre, mais quoi qu’il arrive : suivez les flèches. Les conditions météorologiques y sont bien différentes de la région centrale. Une fois sortis de la protection des montagnes côtières, il n’y a plus rien pour éviter au vent de souffler depuis l’océan vers les sommets. Du coup en hiver les précipitations sont aussi bien plus importantes. Il faut donc dealer avec les tempêtes et trouver les bons créneaux.

Le gros avantage c’est que ces montagnes sont skiables sur 360°, avec vue imprenable depuis les sommets. Ne pensez pas trouver ici des couloirs encaissés et de la pente raide, mais bien des montées douces qui vous guideront vers les fumeroles sommitales des cratères, un vrai El Dorado du randonneur. Depuis des altitudes basses on atteint sur certains d’entre eux plus de 3000 m d’altitude comme sur le Volcan Lanin et ses 3747 m. Vous pourrez aussi profiter de quelques installations qui vous feront gagner un peu d’énergie dans vos ascensions. Sur la route vient en premier la station de Nevados de Chillan, réputée comme le plus grand domaine skiable du Chili et qui donne accès à trois volcans: le « Nuevo » (3186m), le « Viejo » (3192m) et le « Nevado » (3212m). Puis vient Corralco, ses célèbres Araucarias (arbre endémique à la région) et son volcan Lonquimay (2865m). En passant rapidement devant l’Antuco (2979m), et après 10 heures de trajet depuis le centre du pays, le volcan Villarica (2872m), de son vrai nom Rukapillan, est le plus connu de tous, le plus accessible et sûrement celui qui donne la plus belle des vues sur les lacs qui remplissent le bas des rivières de lave. Dernière étape le Volcan Osorno (2661m) et sa station d’Atillanca. Plus au Sud c’est la Patagonie. A l’Est c’est l’Argentine, avec à 3h de là la légendaire ville de San Carlos de Barriloche et son domaine skiable de Cerro Catedral.

Le grand sud, la Patagonie

Pas grand-chose à dire sur la Patagonie. On pourra tout de même souligner qu’il n’y a rien, sauf des montagnes et des lacs, que tout est immense, que tout est beau, qu’il y pleut beaucoup et que les noms y résonnent comme des mythes: Torres del Paine, Fitz Roy, Cerro Torre, El Calafate… La seule station que vous trouverez est celle de Cerro Castillo (700 km de Osorno), la seule et unique située à l’Est des Andes. Cette partie du territoire empiète légèrement sur la pampa argentine, et le Chili garde là l’un des plus beaux endroits sur Terre. Pour s’y rendre, mieux vaut prendre l’avion, mais rien ne vous empêche de finir la panaméricaine dans un bus première classe jusqu’à Ushuaia (Argentine), à plus de 1000 km à vol d’oiseau. Vous trouverez là les remonte-pentes les plus australes de la planète. Prévoyez de rester quelques jours en totale autonomie, si le coeur vous en dit.

Fini de chiller : je vais skier au Chili

Pour les aventuriers, les téméraires et autres sanspeur, oui le Chili est fait pour vous. Car malgré tout, ce pays n’est pas non plus très développé en matière d’infrastructure hivernale. A vrai dire, la montagne, les Chiliens commencent tout juste à la regarder, et il reste des centaines de vallées vierges et de sommets sur lesquels personne n’a encore jamais posé le pied (surtout dans la neige). L’été, les accès à ces vallées sont largement praticables et bon nombre de Santiaguinos profitent de l’altitude pour aller se rafraîchir. Pendant la saison froide, ce n’est pas la même. Les chemins de terre taillées à flanc de montagne sont souvent remplis de neige et assujettis aux avalanches et chutes de pierre. Il faut alors réfléchir à deux fois avant de prendre le 4×4 et s’élancer pour une mission qui pourrait devenir un cauchemar.

Sans voiture, il faut compter au moins une journée de marche pour s’approcher au plus près de votre but. Des routes, il n’y en a pas non plus partout, la plupart ayant été construites pour accéder à des chantiers miniers ou hydroélectriques. Au Sud de Santiago jusqu’au début de la région des lacs, plusieurs vallées gigantesques quittent les plaines pour s’enfoncer sur des centaines de kilomètres dans la cordillère, formant des méandres incompréhensibles sans une carte topographique (inexistante) ou Google Earth, souvent le seul moyen de se rendre compte où l’on se trouve. Ils les appellent les « Cajon » et sont associés au nom de la rivière qui en sort. Difficile de trouver quelqu’un connaissant ces lieux, et parfois tout simplement, les locaux veulent garder leur Eden intact. Non, vous ne verrez pas foule si vous vous y enfoncez, et même si certains se sont déjà baladés par ici, tout reste à découvrir. Quelques noms à retenir pour vous perdre : Cajon del Maipo, Cajon del Cachapoal, El Paso Los Libertadores, El Volcan Lanin.

Matériel obligatoire : tente, duvet -15°c, réchaud et tout le reste pour passer de bonnes nuits entre 3000 et 4000 m. Quelques petites cabanes non gardées sont accessibles dans les zones les plus connues, comme au- dessus des stations de la région centrale. Malheureusement en hiver elles sont souvent remplies de neige. D’autres amoureux de la montagne commencent à construire eux-mêmes des cabanes dans les meilleurs spots du moment. Une bonne info si vous comptez fuir la France : après 5 années, si personne ne vous a vu faire votre affaire et que personne ne s’en plaint, la petite cabane faite par vos soins et sans autorisation devient légalement vôtre. De quoi passer du temps tout seul à attendre la prochaine perturbation. Bon voyage !

Les andes 7000 km dont plus de 4000 km au Chili.

Le ski commence dans la région centrale jusqu’aux régions les plus australes. Plus on se dirige au Sud, moins les montagnes sont grandes mais plus il y a de la neige. La saison commence début Juillet et se termine fin Septembre. Forfaits entre 40 € et 60 €.

  • Langue : Espagnol du Chili
  • Monnaie : Pesos chilien (environ 720$ pour 1€)
  • Transport : Le principal port d’entrée reste Santiago, mais il est facile de venir d’Argentine ou du Pérou. Prévoyez juste quelques heures à la frontière (nourriture interdite sauf le fromage !)
  • En arrivant à Santiago, pour rejoindre le Camino Farellones, prendre depuis l’aéroport un taxi ou une navette jusqu’à CantaGallo et trouver SkiVan pour monter aux « 3 Vallées »
  • Les vols internes et les bus sont très accessibles et restent les moyens de transports principaux. Préférez LATAM pour les avions et TurBus pour les bus.
  • Les locations de voitures sont comparables à l’Europe (attention chaines obligatoires)
  • Manger : Beaucoup de viande sur le grill (bien meilleure au Sud), le Ceviche (poisson), les Empanadas (chausson de pain), les Pastel de Choclo (chausson à la farine de mais), le Completo Italiano (hot dog, vert-blanc-rouge), le Churrasco (le burger local), la Mechada (meilleur que le churasco), le fameux Jamon y Queso (jambon fromage dans pain de mie), la Cazuela (bouillon de volaille) et énormément de Palta (avocat).
  • Boire : La Bière (mais difficile d’en trouver de la bonne), du vin (plutôt bon, meilleure rapport qualité prix du monde !), du Nescafé (on prie pour trouver un percolateur), la Hierba Mate (plutôt argentin, attention à vos nerfs), et surtout et plus que tout le Pisco (alcool de raisin) et encore du Pisco.
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